Dans les années 70 la new wave faisait l'effet d'une bombe. Des auteurs francs tireurs osaient défier les paradigmes de la SF classique. Qu'en reste-t-il aujourd'hui ? L'héritage de la new wave n'est pas dans la critique socio politique. Il n'est pas non plus dans le fameux espace intérieur dont on se demande aujourd'hui s'il n'est pas une formule creuse (et oui l'oreille interne de Robert Silverberg c'est chiant). Non il est principalement dans l'introduction massive des sciences humaines dans la SF. Zelazny et Delany ont été les principaux artisans de cette révolution. Si l'on regarde bien on se rend compte qu'ils avaient des précurseurs nommés Vance, Farmer ou Le Guin. L'héritage de la new wave est encore dans la liberté que l'on s'accordait à l'époque tant sur le fond que sur la forme. Ce qui permet aujourd'hui aux auteurs de SF défricher de nouveaux territoires ou de construire un récit de manière originale. Le mouvement suivant de la nouvelle SF américaine a essayé d'amener ces nouveaux apports à une SF de facture classique. Donc la new wave même si de l'aveux de Moorcock elle est allé trop loin a permis au genre de rebondir et de continuer son petit bonhomme de chemin. On peut se demander ce que pourrait apporter aujourd'hui un courant révolutionnaire au genre.
- La conquête de la complexité : la SF s'est rapproché très souvent des idées politiques les plus dogmatiques aussi bien à gauche qu'à droite. Ces liaisons dangereuses l'ont décrédibilisé auprès d'une partie du public. La SF doit se garder d'être le relais des dogmatismes. Au contraire elle doit montrer la complexité de la réalité où souvent il n'y a pas de vrais gentils et de vrais méchants. Elle doit montrer que tout problème est complexe et doit avoir une solution complexe. Même parfois que la réalité comporte des paradoxes qui vont à l'encontre du sens commun.
- La reconquête de la narration : Si un bon nombre d'auteurs se préoccupe de narration ce n'est malheureusement pas vrai des auteurs de hard science. Il suffit de lire Benford ou Bear pour s'en convaincre : style atroce et narration assez laborieuse. Egan n'échappe pas d'ailleurs à ces défauts. Bref on ne peut être un auteur innovant si l'on ne maîtrise pas la narration. Lorsque Jacques Baudou dit que l'avenir de la SF est dans la fantasy, c'est en grande partie à ce niveau là que ça se joue. Les auteurs de fantasy y compris un certains nombres d'auteurs assez moyens d'ailleurs, maîtrisent parfaitement le sens de la narration. Et cela est de plus en plus vrai. Donc on ne veut plus voir des bouquins mal torchés sous prétexte que c'est scientifiquement exact et surtout pas de diagrammes, de schémas ou d'équations ésotériques au milieu d'un texte ( tic assez fréquent chez Benford).
- Devenir une littérature de l'humanisme. Là j'ai envie de pousser un cocorico. En France un auteur comme Pierre Bordage donne des leçons d'humanisme dans chacun de ses romans. Il n'est pas le seul. Je parlais récemment de l'imaginaire positif de Roland Wagner. Mais nous pourrions aussi cite Laurent Genefort. Il semble que dans la nouvelle génération anglo-saxonne cette préoccupation soit également partagée. Il faut montrer le coté positif de l'humanité tout simplement parce que le pire n'est jamais sûr. Parce qu'aussi écrire la noirceur c'est peut être un peu trop facile et que ce n'est pas ce que les lecteurs ont besoin. La SF doit parler d'espoir ou en tout cas essayer.
- Rester une littérature d'imaginaire. Le succès de la fantasy est lié au fait qu'elle propose un imaginaire brut. La SF doit parfois aussi être capable de mettre la réflexion entre parenthèse et proposer de grands moments d'imaginaire. Elle doit être capable de mettre une imagination forte au service de grandes constructions philosophiques.
On se rend compte aujourd'hui que la mundane SF et la singularité sont des réactions de vieux cons de la génération des années 70 qui ne souhaitent pas que le genre évolue. Il est probable que la vieille garde de l'âge d'or a eu la même réaction quand la new wave est apparue. Mais le genre continuera d'évoluer
Nous vivons des temps intéressants.
mardi 19 août 2008
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