Il n'y a pas pire qu'un homme qui a peur. La peur fait prendre des décisions irrationnelles et peut mener vers les abimes de notre société. Alors une foule qui a peur c'est encore plus dangereux.
Tout ça pour dire que quand l'anticipation joue à nous faire peur avec la dystopie et nous dire que le pire est toujours sûr, elle prétend faire acte d'avertissement. Mais l'homme qui a peur ne va pas changer le monde. Au contraire. Donc faire peur n'est peut être pas la bonne stratégie.
Si parler du monde tel qu'il est et présenter les dérives de nos société est nécessaire, ce n'est peut être pas suffisant. Dans le monde sous informé des années 70 parler de l'environnement ou des problèmes sociaux était nécessaire parce que la SF était la seule à communiquer sur ces sujets. Comme plus tard le cyberpunk a communiqué sur les dangers des multinationales. Mais dans le monde sur-informé et anxiogène des années 2010 où personne n'ignore le réchauffement climatique, le terrorisme, les dérives financières.... peut être que la stratégie doit être différente. Certes il y a eu de l'anticipation optimiste dans les décennies précédentes ( Roland C Wagner et Richard Canal s'y sont essayé dans les années 90 par exemple).
Mais en 2008 Jetse de Vries lance l'anthologie Shine, pour présenter des visions positives de l'avenir. D'autres anthologies d'ailleurs ont été dans ce sens là à la même époque. Des autrices comme Genevieve Valentine, Ada Palmer ou Analee Nevitz ont démontré récemment leur volonté de continuer ce mouvement ( et sans doute d'autres auteurs que je n'ai pas identifié). Le mouvement Solarpunk veut présenter des futurs où l'humanité aurait triomphé du réchauffement climatique grâce à l'alliance de la technologie et de l'action éco-citoyenne volontariste.
En France cette tendance a été relayé par Patrice Lajoie et son anthologie Futurs Radieux chez Rivière Blanche. Citons également Jean Christophe Gapdy qui présente une vision positive du multuculturalisme à travers ses textes. Mais dans l'ensemble c'est mince. Le futur proche, chez nous c'est encore les futurs de cauchemars. La mise en avant qu'a eu les romans récents de Laurent Kloetzer nous le prouve de manière éclatante que la noirceur et le sombre dictent encore leur loi dans l'anticipation du proche futur hexagonale.
Une véritable prise de conscience qui prouve que parler du pire n'est peut être pas la seule voie. Que présenter des visions positives peut dissiper les peurs de l'avenir. Pousser l'individu à redevenir un citoyen et pas seulement un consommateur apeuré.
Alors présenter des sociétés où l'on a triomphé du réchauffement climatique, ou le multiculturalisme est présenté comme une chance, ou la diplomatie est plus forte que la guerre..., non seulement ça fait du bien mais ça ouvre des perspectives fascinantes qui peuvent réconcilier la SF avec le monde.
mardi 21 août 2018
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